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vendredi 3 mars 2017

Témoignage de Cécile, diplômée de Toulouse


Coucou les ptit-e-slou-te-s !
Les réseaux sociaux nous ont apporté le harcèlement en ligne, les Tweets de Donald Trump, et les dog face, mais aussi la Révolution Arabe, le partage de documents en ligne, et surtout, des possibilités décuplées d’entrer en contact avec des inconnu-e-s que l’on n’aurait jamais rencontré-e-s mais avec qui on a tant à partager !

Voici le message que m’a adressé Cécile, Psychomotricienne diplômée de l’école de Toulouse depuis 4 ans, en réaction à mon premier article sur le choix de l’école.


   
    Je parcours ton blog et lis tes articles, je trouve ta démarche intéressante. Par contre, permets-moi de te faire part de quelques remarques et quelques avis, pour alimenter tes questionnements dans l’article. Le choix et l'orientation des écoles est bien réel, c'est vrai. Mais je ne crois pas que cette prise de parti soit vraiment justifiée. 

      Cela fait bientôt 4 ans que j’ai obtenu mon diplôme à l’école de Toulouse. Oui, moi aussi j’ai été en colère contre le peu de médiation corporelle, moi aussi j’ai pesté contre tout ce que j’aurais pu apprendre et que la politique de l’école refusait de nous apprendre. Tu sembles bien t’être informée auprès du BDE, et c’est bien, dans ton article tu résumes bien. Non, nous ne faisons pas de danse. Ni de Qi Gong. Ni de danse africaine. Mais dire que nous n’avions « aucune médiation corporelle » est exagéré, et faux. Les choses ne sont pas aussi tranchées que ça. Bouger son corps, expérimenter et ressentir, nous l’avons fait. Nous apprenions de manière régulière et approfondie les méthodes de relaxation, nous apprenions à ressentir en nous-mêmes pour mieux pouvoir proposer aux autres. Nous avions aussi un TD d’expression corporelle (je me sers encore aujourd’hui des exercices de mime avec un groupe de collégiens à qui je donne des ateliers pour mieux apprendre à gérer leur corps). Nous avions aussi appris le « shiatsu », toucher par pression selon médecine chinoise, comme médiation pour le toucher (et je m’en sers encore chaque semaine auprès des patients). Pour avoir reçu en stage des étudiants de plusieurs écoles, aucun ne connaissait cette approche. J’ai aussi été formée à la base de la langue des signes

     Bref. Je ne suis pas ici pour défendre l’IFP de Toulouse, car je lui reprochais et lui reproche toujours des choses, comme n’importe quel étudiant pouvait le faire à n’importe quelle école, d’ailleurs. Par contre, je me demande pourquoi tant de personnes sont réticentes à y entrer. Parce que l’on juge que l’orientation psychanalytique est mieux ? Parce que l’on a peur de passer à côté de la plaque ? On a peur de ne pas aller au fond des choses ? Il s’agit pour moi de peurs et idées complètement reçues. Quand on sort d’une école de psychomotricité, quelle que soit son enseignement, l’apprentissage est loin d’être fini. A l’école, l’apprentissage commence. Sur le terrain, l’apprentissage continue, grandit, et évolue sans cesse. La psychomotricité telle que je la pratique aujourd’hui est un mélange entre ce que j’ai appris à l’école, ce que le terrain m’as appris, ce qui m’a formée par la suite, et mes recherches personnelles. Je sors de l’école de Toulouse, et je travaille dans un hopital de jour psychiatrique à orientation totalement psychanalytique. Mes collègues psy me nourrissent de leur approche, et je les nourris de la mienne. C’est très riche. 

      Je suis attentive à mon corps, je peux identifier mes ressentis. Alors non, je n’ai pas fais de Qi Gong, par exemple. Mais si cela m’intéresse, ou si j’estime que cela peut apporter à ma pratique, alors je trouve un stage, ou je prends des cours. Oui, je sais faire passer plein de tests. Mais ça, mes collègues psychomot formés à Paris ne savent pas le faire. Mais si cela les intéresse, ou s’ils estiment que cela peut apporter à leur pratique, ils se renseignent, ou se forment. Ce que l’école ne t’a pas enseigné, alors tu peux aller le trouver par toi-même. C’est valable partout, et c’est aussi le principe de notre métier. En face du patient, il nous faut nous adapter, et surtout, ne nous fermer aucune porte car tous les outils seront bons. Au jour d’aujourd’hui, je crois sincèrement qu’il faut arrêter de se figer sur la psychanalyse, ou sur les neuro-sciences. On a besoin de tout. Et aucune approche n’est mieux qu’une autre. 

     Donc voilà, pour choisir son école de psychomot, il faut aussi se laisser surprendre, faire confiance et ne pas juger avant d’y avoir été. J’ai été sur des forums pour les gens qui préparent les concours et je suis totalement subjuguée de voir le nombre de jugements de valeurs que l’on peut y trouver, concernant les écoles. Toujours garder son esprit ouvert. Pour moi, c’est une des plus grandes capacités du psychomotricien.



Profitant d’avoir sous la main une ancienne étudiante toulousaine ayant éprouvé son apprentissage sur le terrain, j’en ai profité pour lui poser une question qui m’a longtemps taraudée en entrant à l’école de Toulouse :

Est-ce que l’absence de médiations corporelles au cours de ta formation t’a gênée dans ta pratique professionnelle ?


      Oui et non. 

      Non, parce que comme je te disais, nous n'avions pas rien ! Tous les TD étaient plutôt pertinents, j'ai trouvé de l'intérêt dans tous et nous y avions expérimenté plein de choses. Depuis que je pratique ce métier, plein de ces choses m'ont servies et me servent encore. Tu es actuellement en 1ère année qui est une année très théorique et parfois barbante, mais le meilleur reste à venir... Et puis par l'ATEP nous faisons venir de chouettes intervenants, ça complétait bien. Evidemment, dans le principe, ça aurait été mieux que nous n'ayons pas à nous occuper de ça, mais bon, le résultat était quand même chouette. 

     Oui, d'un autre côté, j'aurais parfois aimé en avoir plus, des médiations. Surtout quand nous étions amenés à échanger avec les autres écoles et que nous découvrions ce que faisaient les autres..."Waou mais ils ont trop de chance ils font de la danse! " Bon ok c'était dommage, mais ce type de regret, personnellement, je suis vite passée outre, je me disais que les autres avaient ça, mais nous avions aussi des choses que les autres n'avaient pas. Comme dit le dicton, l'herbe nous parait toujours plus verte chez le voisin. Je n'ai jamais trop adhéré à cette philosophie de vie...donc mon positionnement est très personnel là dedans. 

      Aujourd'hui, quand j'interviens en vacataire à l'école de Mulhouse et que je vois tout ce qui est proposé aux étudiants en terme de médiations, je me dis aussi qu'ils ont beaucoup de chance (et j'essaye d'ailleurs de leur dire, qu'ils en aient conscience). Mais bon, tout cela pour te dire qu'au final, cela n'a jamais fait de moi une psychomotricienne qui avait l'impression d'être passée à coté de quelque chose. Je ne me sens pas du tout à la ramasse à côté de mes collègues sortant de l'école de Paris, ou de Lyon ou d’ailleurs. Je n'ai pas du tout l'impression de manquer de savoirs faire ni de savoirs être. Et puis ce n'est pas la quantité de médiations corporelles qui fera de nous des bons ou des mauvais professionnels, ça, c'est pour moi une idée fausse et reçue. 

     Donc entre ce oui et ce non, je ne regrette rien. J’ai pris ce qu’il y avait à prendre à l’institut de formation, point final. Ton chemin de psychomotricien se trace peu à peu à la sortie du diplome, en fonction de là où tu vas t'orienter. Et ce qui te manque dans ta pratique, si tu vas un peu le chercher, tu finis toujours par le trouve


T’es tu formée à des médiations après ton diplôme ?


      Depuis que je travaille je n'ai pas fais de formation spécifique sur une médiation. Déjà pour te situer les choses, à la sortie du diplome j'ai travaillé 2 ans auprès d'enfants et ados polyhandicapés, puis j'ai rebifurqué en psychiatrie adulte. Je dis rebifurqué parce qu'en 3ème année j'avais fais mon stage long en psy adulte, et même si ce milieu m'attirait déjà sans le connaître, je m'y suis trouvée comme un poisson dans l'eau. J’ai donc fini par quitter mon poste dans le polyhandicap, et j’ai gardé celui en psychiatrie.


      Dans le polyhandicap, l’institution nous proposait quelques petites formations courtes mais rien de bien phénoménal. J'ai surtout approfondi mes connaissances sur le toucher thérapeutique en fait. A un moment donné je voulais m'inscrire en formation de danse thérapie, surtout parce que je suis pratique la danse à titre perso, mais finalement je n'ai pas poussé plus loin. Peut-être plus tard, on verra. 

     Ensuite quand j'ai commencé à travailler en psychiatrie adulte, là j'ai réalisé qu'il me fallait plus de médiations corporelles et de matière. A titre perso, quand j'ai pu, j'ai pris quelques cours de Tai Chi et de Qi Gong (aussi par intérêt perso), je me suis beaucoup renseignée auprès d'un psychomotricien pratiquant le Tai Chi depuis 20 ans en psychiatrie. J'ai pris quelques ateliers avec lui, lors de journées d'échanges de pratiques. Il m'a bien aiguillée. J'ai même hésité à prendre des cours à l'année, mais financièrement j'étais un peu ric rac, et je suis quelqu'un qui a besoin d'activités corporelles plus "explosives". Par contre, le peu que j'ai appris en Tai Chi et Qi Gong, je l'exploite, je le remanie, et je l'utilise avec les patients.

     En fait, je n'ai jamais entrepris de formation sur une médiation corporelle spéciale. Pour l'instant je n’en ressens pas le besoin, je n'en pratique pas une seule de manière exclusive, j’en mixe plusieurs. Comme je prend des stages de danse, parfois j'y trouve de la matière à exploiter en thérapeutique. Certains exercices que je propose aux patients sont issus de ces stages de danse contemporaine par exemple. J'ai participé à quelques initiations en Yoga. Je le pratique aussi un peu pour moi, et parfois je l'utilise avec des patients. Sinon, j'utilise toujours beaucoup le toucher : enveloppements, pressions profondes, shiatsu (appris à l'école de Toulouse), automassages...etc. Je participe quand je peux à des échanges de pratique, des ateliers, des colloques internationaux (où il y a des ateliers). J'en reviens toujours avec de la matière à exploiter !! Ah si, j’allais régulièrement en balnéothérapie avec les enfants handicapés, et puis j'ai eu une petite formation par le même psychomotricien qui fait du Tai Chi. Il pratique l'hydrothérapie. Cela me sert beaucoup, car actuellement dans mon travail en psychiatrie, tous les vendredi matin j'anime un atelier à la piscine. Par l'intermédiaire d'un ami, j'avais découvert la méditation. Je la pratique pour moi et je réalise que c'est un médiateur hyper intéressant pour les patients. Donc j'ai fais des recherches, j'ai lu des bouquins, et hop c'est parti, il faut pratiquer. 

     Voilà... Donc tu vois, pour l'instant je fonctionne comme ça et ça me convient. Je me nourris et reste curieuse. On pourrait percevoir tout ça comme une petite boite à outils, chaque psychomotricien se construit la sienne en fonction de lui et de la population avec laquelle il travaille. Ce n'est pas toujours évident pour une institution de payer des formations donc je pars du principe que je fais mon chemin.



Merci Cécile pour ton témoignage :)

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